Traduit par Maurice Cosandey.
La molécule qui permet aux arbres de tenir debout est aussi à l’origine de la première vie pluricellulaire, et permet enfin de faire de superbes cadeaux.
Quelle est la molecule laplus abondante sur Terre ? Serait-ce un polymère artificiel ? Non, cette molecule est d’origine végétale, et on la rencontre en se promenant sous bois, car cette molécule est la cellulose. Et c’est elle que produisent les plantes pour construire leur propre structure spatiale.
Sur Terre, les plantes produisent au moins 100 milliards (1011) tonnes de cellulose par année, ce qui au moins mille fois plus que tous les plastiques produits dans le même temps. De plus, cette cellulose est extrêmement utile. Le papier sur lequel est imprimé cet article est à base de cellulose, comme le sont aussi les T-shirts et autres jeans, car le coton est une forme particulière de cellulose. Nos meubles sont en général faits de bois, qui est lui-même constitué en majorité de cellulose. Les chalets sont en bois. Et bien des gens utilisent le bois comme source de chaleur pour chauffer leurs maisons, imitant en cela la méthode de chauffage de nos ancêtres de la préhistoire.
Malgré sa taille gigantesque, la cellulose est une molécule étonnamment simple. Elle est constituée de molécules du sucre glucose. Il suffit parfois que quelques milliers de molécules de glucose accrochées en chaîne pour faire une seule molécule de cellulose. Le glucose lui-même est synthétisé par les plantes à partir de dioxyde de carbone et de lumière, grâce à la photosynthèse.
Une macromolecule de cellulose consiste en un faisceau de chaînes appelées glucane. Une chaîne de glucane est faite de nombreuses molécules de cellobiose, elle-même formée de deux molécules de glucose (figure 1) . Les chaînes de glucane sont linéaires, et elles s’associent en faisceau par des liaisons hydrogène assez faibles. Ce sont ces liaisons faibles qui donnent à la cellulose ses propriétés. Par exemple, elles aident la cellulose à repousser l’eau, et donc à maintenir leur forme aux végétaux en présence d’eau. De plus, elles rendent la cellulose résistantes aux acides et bases. (Ross et al., 1991).
On trouve de la cellulose partout dans le monde vivant, et pas seulement dans les plantes. Certains champignons ont une membrane faite de cellulose, bien qu’en general cette membrane soit faite de chitine. Les algues, les amibes et les invertébrés marins appelés tunicates produisent aussi de la cellulose. Chez certains poulpes, la cellulose aide les larves à se métamorphoser en adultes, en formant une partie de leur tunique, qui est une sorte d’exosquelette. Les amibes accumulent de la cellulose dans des sortes de tiges en forme de champignons, servant de réserves de nourriture si tout à coup la nourriture se faisait rare.
De manière plus surprenante, il existe des bactéries qui produisent de la cellulose (Ross et al., 1991; Zogaj et al., 2001). Le séquençage de leur génome a montré que cette capacité se trouve chez de nombreuses bactéries, depuis les formes les plus anciennes jusu’à celles qui colonisent le tract gastrointestinal, comme les variétés très connues E. Coli et les salmonelles (Escherichia coli, Salmonella typhimurium) (Römling & Galperin, 2015).
Pourquoi est-ce que les bactéries produisent de la cellulose ? Cette molécule, qui est si intimement associée aux propriétés de rigidité structurelle des plantes, aide les bactérie à s’adapter à l’environnement. Elle aide les bactéries associées aux plantes à s’attacher à leur surface. Et si ces bactéries sont pathogènes, elles se lient facilement aux cellules hôtes à qui elles transmettent la maladie. Certaines bactéries vivant en eau salée, comme les cyanobactéries et les espèces thermophiles, produisent de la cellulose qui les protège de l’asséchement, et des autres menaces environnementales comme les rayons ultra-violets et les désinfectants.
En fait, les cyanobactéries pourraient bien être à l’origine de la capacité des plantes à produire de la cellulose. Au cours de l’évolution, ces bactéries se sont incorporées aux plantes sous forme de chloroplastes, en transmettant le code génétique de la cellulose. Ces gènes se trouvent maintenant dans le génome des plantes plants (Nobles et al., 2001). Ce phénomène s’explique par la théorie endosymbiotique : il y a un milliard d’années, les cyanobactéries ont été capturées par les ancêtres des algues actuelles, qui se sont ensuite diversifiés pour former les nombreuses espèces photosynthétiques des plantes et des algues. Cette théorie s’appuie sur le fait que, bien que les chloroplastes d’aujourd’hui ont perdu la majorité de leurs gènes d’origine, le gène ancestral de l’enzyme permettant de produire de la cellulose a été transféré au génome de la plante, et montre une étrange ressemblance avec le gène de la cyanobactérie actuelle.
One of the main reasons that bacteria make cellulose is to produce ‘biofilms’ – cellulose films that form a matrix outside bacterial cells and help their multicellular communities to stick together. These bacterial communities were the earliest form of multicellular life on Earth, dating back to around 3.1 billion years ago. Today, there are many micro-organisms that show a similar multicellular lifestyle, which functions remarkably like tissue formation in higher organisms and is thought to make more efficient use of nutrients.
L’une des raisons qui pousse les bactéries à faire de la cellulose est la production d’une enveloppe externe dite “biofilm”, qui permet aux communités multicellulaires de s’agglomérer ensemble. Ces communautés bactériennes sont les plus anciennes formes de vie pluricellulaire connues sur Terre, puisqu’elles datent d’il y a 3.1 milliard d’années. Aujourd’hui, il existe beaucoup de microorganismes qui fonctionnent ainsi, ce qui rappelle la formation des tisus dans les organismes supérieurs.(Pontes et al., 2015; Ahmad et al., 2016).
fermenté, pas encore très
connu, est fait de grains de
cellulose bactérienne.
Römling & Galperin (2015)
La cellulose bactérienne possède des propriétés que celle des plantes n’a pas. Par exemple, elle est spécialement pure. Elle a aussi une très grande surface spécifique et une énorme capacité de rétention d’eau. C’est aussi un nanomatériau. La cellulose bactérienne semble donc bien promise à un développement commercial, même si ses applications commencent juste à être explorées. On peut citer par exemple :
Il se pourrait que cet ancienne substance soit en voie de devenir le supermatériau de l’avenir, dans lequel les bactéries nous aideraient au lieu de nous nuire.