Author(s): Patricia Tellinghuisen
Traduit par Camille Ducoin. L'hérédité mendélienne peut être un sujet difficile à enseigner. Grâce au mémorable jeu d'élevage de dragons présenté par Pat Tellinghuisen, Jennifer Sexton et Rachael Shevin, cette notion sera plus facile à comprendre et à retenir.
Image reproduite avec
l’aimable autorisation de julos
/ iStockphoto
Les dragons ont beau être des créatures mythologiques, ils n’en sont pas moins de bons sujets pour l’étude de l’hérédité mendélienne. Dans l’activité suivante, vous allez “élever” des bébés dragons, avec l’aide de chromosomes en papiers qui déterminent leur génotype et leur phénotype.
Cette activité a été testée avec des élèves de 12-13 ans. Elle dure géneralement le temps d’une leçon, de 45 à 60 minutes.
Matériel
Pour l’ensemble de la classe
- Une maquette de molécule d’ADN
- L’image d’un chromosome
Pour chaque élève
- Un jeu de chromosomes (bandes de papiers) de 2 couleurs : 14 bandes roses pour la mère, 14 bandes bleues pour le père
- Une fiche de travail
- Des crayons de couleurs (au moins quatre)
Vous pouvez télécharger les chromosomes, les tableaux 1 à 3, la fiche de travail et une base de dessin de dragon sur le site Internet de Science in Schoolw1.
Démarche
En utilisant les informations ci-dessous, introduisez l’histoire des dragons et les bases nécessaires pour réaliser cette activité. Ensuite, distribuez le matériel et laissez les élèves suivre les instructions figurant sur la fiche de travail. Les tableaux 1 à 3 peuvent aussi être téléchargés sur le site de Science in Schoolw1.
L’histoire
Les dragons sont de curieuses créatures. Pourtant, leur système génétique est très semblable à celui des humains, voire même des cochons d’Inde. Beaucoup d’écoles possèdent des cochons d’Indes, mais ne serait-il pas plus fascinant d’élever une bande de dragons? Malheureusement, les dragons coûtent très cher, et votre école ne peut en acheter que deux : un mâle et une femelle. Le but de cette activité est de déterminer quels types de dragons peuvent voir le jour quand (et si) vos deux dragons décident de s’accoupler.
Comment l’ADN s’enroule en
chromosomes (ce dessin
n’est pas à l’échelle). Cliquer
sur l’image pour l’agrandir
Image reproduite avec
l’aimable autorisation de Darryl
Leja, NHGRI / NIH
Connaissances de base pour les élèves
Chacune des cellules qui consituent un être vivant contient les informations sur son hérédité, codées par une molécule appelée acide desoxyribonucléique (ADN) : montrez aux élèves la maquette d’ADN. L’ADN est une molécule extrêmement longue et mince. Elle forme ce qu’on appelle un chromosome lorsqu’elle est enroulée sur elle-même : montrez aux élèves l’image d’un chromosome. Chaque chromosome est fait d’un seul morceau d’ADN, ainsi une cellule avec huit chromosomes contient huit longs morceaux d’ADN.
Un gène est un segment de la longue molécule d’ADN. Différents gènes peuvent avoir différentes longueurs, et chaque gène est un code pour la construction d’un polypeptide particulier. Un ou plusieurs polypeptides forment une protéine. Il existent généralement deux sortes de protéines : celles qui contrôlent les réactions chimiques (enzymes), et celles qui composent la structure de votre corps (protéines structurales). L’apparence et le fonctionnement d’un organisme résultent de la combinaison de ces deux types de protéines.
Différents allèles du même
gène (ce dessin n’est pas à
l’échelle)
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l’aimable autorisation de Nicola
Graf
Tout organisme qui a des “parents” a un nombre pair de chromosomes, car la moitié des chromosomes vient du “père” et l’autre moitié vient de la “mère”. Par exemple, chez les plantes, un grain de pollen contient la contribution paternelle, et un ovule contient la contribution maternelle. Ces deux cellules se combinent en une seule cellule, qui grandit pour former une graine (la progéniture).
Les humains ont 46 chromosomes, arrangés en 23 paires. Pour chacune des paires, un chromosome vient de la mère et l’autre du père. Comme les chromosomes vont par paires, il en va de même pour les gènes. Un gène est situé sur l’un des chromosomes de la paire; l’autre gène est situé au même emplacement, sur l’autre chromosome. La paire de gènes forme ce qu’on appelle le “gène”, car les deux membres de la paire contribuent à déterminer la même caractéristique. Pour tout gène, il peut exister différentes versions, appelées “allèles”, mais chaque personne possède au maximum deux de ces allèles (l’un venant de la mère, et l’autre du père). Les deux copies du gène que possède une personne peuvent être des allèles identiques ou différents.
Nos dragons ont 14 chromosomes arrangés en 7 paires, et nous regarderons seulement un gène sur chacune des paires. Nous allons chercher différentes caractéristiques, comme la capacité de cracher du feu, dont chacune est contrôlée par un seul gène : on dit que ce sont des caractéristiques monogéniques. Chacun des 7 gènes a deux allèles.
Fiche de travail des élèves
Un ensemble de 14 bandes représente les chromosomes de la mère dragon (femelle). L’autre ensemble, de couleur différente, représente les chromosomes du père dragon (mâle).
Chaque chromosome porte une lettre, qui peut être majuscule ou minuscule. Les majuscules représentent les allèles dominants, et les minuscules représentent les allèles récessifs. Chaque paire de lettres code une caractéristique. Si au moins un allèle dominant (lettre majuscule) est présent, la caractéristique dominante apparaît (par exemple, le dragon crache du feu). La caractéristique récessive n’apparaît que si le dragon a deux copies de l’allèle récessif.
Les caractéristiques codées par les lettres sont les suivantes :
- Rangez les chromosomes par paires de chromosomes de même longueur, portant la même lettre de l’alphabet. Pour chaque couleur, vous devez avoir 7 paires de chromosomes.
- F et f déterminent si le dragon est ou non capable de cracher du feu
- M et m déterminent le nombre de doigts
- S et s déterminent le nombre de piques sur la queue
- T et t déterminent la couleur de la queue
- A et a déterminent la couleur de la tête et du corps
- W et w déterminent la couleur des ailes
- H et h déterminent si le dragon a une corne ou pas.
- Prenez la plus longue paire de chromosomes paternels (bleus), et la plus longue paire de chromosomes maternels (roses) ; placez-les sur votre bureau, à l’envers, de façon à ne pas voir les lettres.
- Sans retourner les chromosomes, choisissez-en un de chaque couleur et mettez-les ensemble afin de former une paire de chromosomes du bébé dragon. Écartez les deux chromosomes restants.
- Répétez les étapes 2 et 3 pour chaque paire, en allant de la plus longue à la plus courte, jusqu’à obtenir sept nouvelles paires de chromosomes. Chaque paire en contient un rose et un bleu.
- Retournez les sept paires de chromosomes du nouveau bébé dragon. Pour chaque paire, inscrivez la lettre du chromosome bleu dans la colonne “gène paternel” du Tableau 1, et celle du chromosome rose dans la colonne “gène maternel”. Faites attention de bien distinguer les majuscules et les minuscules.
- Remettez les chromosomes dans leurs étuis respectifs.
Dessin de base du dragon
Image reproduite avec
l’aimable autorisation de Nicola
Graf
- Dans la seconde colonne du Tableau 2,inscrivez les allèles que possède votre dragon pour chacune des caractéristiques. Les deux allèles hérités sont appelés génotype (par exemple, TT). Les caractéristiques observables d’un individus sont appelées phénotype (par exemple, une queue rouge).
- Reportez-vous au Tableau 3 pour déterminer quels sont les caractéristiques associées aux allèles dominants et récessifs, puis inscrivez le phénotype de votre dragon dans le Tableau 2.
- Vous pouvez maintenant dessiner votre bébé dragon : coloriez-le et ajoutez les parties du corps qui conviennent (le dessin de base peut être téléchargé sur le site de Science in Schoolw1). Le Tableau 3 for suggestions as to how the additional body parts can be drawn.
Gène paternel (bleu) |
Gène maternel (rose) |
Tableau 1: Les gènes que votre dragon a hérités de ses parents
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Caractéristique |
Génotype |
Phénotype |
Tableau 2: Génotype et phénotype de votre bébé dragon
Feu/Pas de feu (F/f) |
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Doigts (M/m) |
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Piques sur la queue (S/s) |
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Couleur de la queue (T/t) |
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Couleur des ailes (W/w) |
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Avec corne / Sans corne (H/h) |
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Couleur de la tête et du corps (A/a) |
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Génotype |
Phénotype |
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Tableau 3: Traduction du génotype du dragon en phénotype
FF ou Ff |
Crache du feu |
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ff |
Ne crache pas du feu |
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MM ou Mm |
Quatre doigts |
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mm |
Three toes (all dragons have at least three toes) |
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SS ou Ss |
Cinq pics sur la queue |
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ss |
Four spikes on tail (all dragons have at least four tail spikes) |
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TT ou Tt |
Queue rouge |
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tt |
Queue jaune |
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WW ou Ww |
Ailes rouges |
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ww |
Ailes jaunes |
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HH ou Hh |
Avec corne |
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hh |
Sans corne |
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AA ou Aa |
Tête et corps bleus |
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aa |
Tête et corps verts |
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Analyse
- Comparez votre dragon aux autres dragons de la classe. Quelles différences et ressemblances remarquez-vous?
- Comment expliquez-vous les différences, étant donné que ces dragons ont tous les mêmes parents?
Variations
Codominance
Pour introduire le concept de codominance, vous pouvez étendre l’activité précédente en remplaçant le matériel associé à la couleur du corps (génotypes A/a) de façon à mettre en jeu les génotypes A/Ä/a. Dans ce cas, A et Ä sont codominants, et a est récessif:
Génotype |
Phénotype |
Tableau 1a: Traduction du génotype du dragon en phénotype (extension à un cas de codominance)
AA ou Aa |
Tête et corps bleus |
ÄÄ ou Äa |
Tête et corps noirs |
AÄ |
Tête et corps à rayures noires et bleues |
aa |
Tête et corps blancs |
Caractéristique |
Génotype |
Phénotype |
Tableau 2a: Génotype et phénotype de votre bébé dragon (extension à un cas de codominance)
Couleur du corps (A/Ä/a) |
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Vous allez remplacer les paires de chromosomes A/a par deux autres jeux de chromosomes, de façon à pouvoir obtenir les six génotypes possibles. La moitié de la classe reçoit le premier jeu de chromosomes, l’autre moitié le second.
Autres variations
Au lieu de dessiner des morceaux de dragons, vous pouvez dessiner d’autres créatures mythiques, ou même les construire, par exemple à l’aide de pics et de marshmallows (voir Soderberg, 1992).
Remerciements
Cette activité est basée sur une idée de Patti Soderberg, adaptée avec la permission de The Science Teacher (voir : Soderberg, 1992). Sa leçon sur les “reebops” (créatures imaginaires) a été adaptée par les auteurs. Les bandes de chromosomes sont à mettre au crédit de Nancy Clarkw2. L’exemple de la codominance a été introduit par Marlene Rau, éditrice de Science in School.
References
- Soderberg P (1992) Marshmallow meiosis. The Science Teacher 59(8): 28-31.
Web References
- w1 – Le matériel pour cet activité peut être téléchargé ici:
- w2 – Nancy Clark, professeur de science à la retraite, a mis en ligne une collection de ressources pédagogiques: www.nclark.net
- w3 – Pour en savoir plus sur les Vanderbilt Student Volunteers for Science, visitez le site: http://studentorgs.vanderbilt.edu/vsvs
Resources
- En Écosse, le projet “Gene jury” propose le jeu “fabriquez un bébé”, en se focalisant sur la génétique et le diagnostique pré-implantation. Visitez le site du projet (www.biology.ed.ac.uk/projects/GeneJury) ou utilisez le lien direct : http://tinyurl.com/6edlhnq
- Pour en savoir plus sur les maladies génétiques et la recherche qui leur est consacrée, voir :
- Voici les références de notre article en deux parties sur l’évolution moléculaire et la génétique qui se trouve derrière la sélection positive de certains allèles :
- Toujours sur le thème de la génétique et de l’évolution, un moyen simple d’emseigner le principe de Hardy-Weinberg est décrit ici :
- Essayez le jeu en ligne du Science Museum britannique, “Thingdom”, pour apprendre la génétique tout en créant votre propre organisme imaginaire. Voir : www.sciencemuseum.org.uk/WhoAmI/Thingdom.aspx
Author(s)
Patricia Tellinghuisen est directrice de Vanderbilt Student Volunteers for Science (VSVS)w3 et conseillère à l’Université Vanderbildt à Nashville, dans le Tennessee (États-Unis). Jennifer Sexton et Rachael Shevin ont été étudiants volontaires du VSVS.
Review
En tant qu’enseignante de biologie dans le secondaire, il ne m’était jamais venu à l’idée de faire un cours de génétique basé sur des créature mythologiques ; mais une fois passée la surprise initiale, j’ai réalisé qu’utiliser la génétique des dragons était tout à fait cohérent avec les faits scientifiques… et vraiment amusant! L’idée de choisir les gènes au hasard et de chercher les caractéristiques correspondantes des bébés dragons est à la fois ingénieuse et efficace.
Bien qu’ils ne soient pas réels, les dragons peuvent aider à éveiller l’intérêt pour un sujet généralement considéré comme ennuyeux (au moins par les élèves) et porter des concepts scientifiques aussi réels que dans le cas des pois de Mendel.
Je recommande cet article pour les enseignants de primaire et de collège souhaitant aborder les bases de la génétique mendélienne (gènes, allèles, génotype et phénotype, méiose et reproduction) d’une façon nouvelle et ludique. Cette activité peut être réalisée en classe très facilement, et sans équipement particulier.
Quelques questions associées :
- Les dragons ont :
- sept chromosomes
- sept gènes
- sept paires de chromosomes
- sept allèles.
- Quand deux dragons se reproduisent, le nombre de chromosomes de leur rejeton :
- est divisé par deux
- reste le même
- est doublé
- dépend du sexe.
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