La pile à bactéries: de l’électricité à partir de la levure Teach article

Traduit par Maurice A Casimir. Nous savons tous que l’on utilise la levure pour produire la bière et le pain – mais de l’électricité? Dean Madden, du Centre National pour l’Education aux Biotechnologies, Université de Reading, Royaume Uni, nous montre comment cela marche.

Une pince crocodile
Illustration reproduite avec
l’aimable autorisation de
Jobalou / iStockphoto

Introduction

Les microbes générateurs d’électricité sont restés une curiosité biologique pendant des décennies. Aujourd’hui, cependant, des chercheurs entrevoient leur utilisation dans des montres et des caméras, comme sources d’énergie et dans des bioréacteurs produisant de l’électricité à partir de déchets organiques. La pile à bactéries décrite ci-après fournit du courant électrique en dérivant des électrons de la chaîne respiratoire de la levure. Elle utilise un ‘médiateur’ (du bleu de méthylène dans notre cas) pour libérer les électrons et les transférer dans un circuit extérieur. Ce processus n’a pas un haut rendement, et cette pile à combustible de démonstration ne génère qu’un faible courant. Ceci peut fournir une introduction stimulante à des élèves pour l’étude de la respiration et permettre l’étude de certains des facteurs affectant la respiration microbienne. Plus récemment, des piles à bactéries sans médiateur plus performantes, dans lesquelles des microorganismes libèrent des électrons directement aux électrodes de la pile ont été développées.

Equipement et matériaux

Nécessaire pour chaque élève ou groupe de travail

Equipement

  • Pile à bactéries Perspex, obtenue à partir d’une feuille de Perspex de 4 mm d’épaisseur
  • 2 joints d’étanchéité en néoprène
  • Membrane d’échange cationique, découpée pour s’insérer entre les cellules de la pile à combustible. On peut réutiliser la membrane indéfiniment, mais elle fondra en autoclave.
  • 2 seringues de 10 ml en plastique pour délivrer des liquides
  • Support ou couvercle de disque de Petri sur lequel poser la pile à combustible
  • 2 câbles électriques avec pince crocodile
  • Voltmètre ou multimètre 0-5 V et/ou moteur courant faible
  • Ciseaux.
La fibre de carbone utilisée
pour faire les électrodes a un
‘grain. ’Pour s’assurer que le
‘bout’ allongé de l’électrode
ne se déchire pas et qu’il
s’insère facilement à travers
le trou de la pile, il et
nécessaire de la découper et
de la plier comme montré ici.
Couper à environ la moitié de
la pièce supérieure comme
indiqué, puis plier en deux,
puis encore en deux pour
former un ‘bout’ sur
l’électrode. Cliquer sur
l’image pour l’agrandir

Illustration reproduite avec
l’aimable autorisation de Dean
Madden

Matériaux

  • 2 électrodes en fibre de carbone, découpées pour s’insérer dans la pile à combustible
  • 2 morceaux de J-Cloth® ou tissue similaire, découpé pour s’insérer dans la pile à combustible (l’objet de ce tissu est simplement d’empêcher les électrodes de venir au contact de la membrane d’échange cationique et de mettre la pile en court circuit)

Important: toutes les solutions énumérées ci-dessous doivent être préparées en solution tampon de phosphate 0.1M à pH 7.0 et non dans l’eau

  • Levure séchée, sous forme de bouillie épaisse dans une solution tampon de phosphate 0.1M (ne pas ajouter la solution de glucose avant d’avoir réhydraté la levure dans la solution tampon)
  • 5 ml de solution de bleu de méthylène (10 mM)
  • 5 ml de solution de glucose
  • 10 ml de solution d’hexacyanoferrate (III) de potassium (0.02 M) (aussi appelé ferricyanure de potassium).

Mode opératoire

  1. Découper deux electrodes en fibre de carbone comme indiqué dans l’illustration.
  2. Découper deux morceaux de J-Cloth à insérer à l’intérieur de la pile à bactéries.
  3. Assembler la pile à bactéries comme indiqué ci-dessous.
    Poser la pile à bactéries assemblée sur un support ou un couvercle de disque de Petri pour collecter tout liquide pouvant s’échapper de la pile.
  4. Mélanger des volumes égaux (5 ml) des solutions de bouillie de levure, de glucose et de bleu de méthylène. Transférer à la seringue le mélange dans l’un des éléments de la pile à bactéries.
  5. Transférer à la seringue la solution d’hexacyanoferrate (III) de potassium dans l’autre élément de la pile.
  6. Connecter un voltmètre ou un multimètre (via les pinces crocodile) aux extrémités des électrodes. Un courant doit se manifester immédiatement – si l’appareil de mesure reste à zéro, vérifier les connexions et s’assurer que les électrodes en fibre de carbone ne sont pas au contact de la membrane d’échange cationique.
Assemblage d’une pile à bactéries (les dimensions exactes sont sans importance – celle qui est montrée mesure grossièrement 55 mm x 55 mm)
Illustration reproduite avec l’aimable autorisation de Dean Madden

Résultats typiques

Des piles à bactéries de ce type génèrent normalement de 0.4 à 0.6 V et 3 à 50 Ma. Si la pile est mise au niveau de solutions nécessaire, elle continuera à produire de l’électricité pendant plusieurs jours.

Fonctionnement de la pile à combustible microbienne:
Des cellules de levure sont introduites dans la solution de glucose de l’un des éléments de la pile. Un médiateur, du bleu de méthylène, pénètre dans les cellules de levure et extrait des électrons de la chaîne respiratoire. Les électrons passent alors sur une électrode (anode). De là, ils transitent par le circuit extérieur et entrent en contact avec l’hexacyanoferrate (III) de potassium du second élément de la pile. L’hydrogène passe à travers une membrane d’échange cationique séparant les deux éléments.
Les piles à combustible microbiennes de ce type génèrent normalement de 0.4 à 0.6 V et 3 à 50 mA. Cela suffit pour entraîner un moteur à très faible consommation. Si l’on relie en série plusieurs piles équivalentes, il est possible de faire fonctionner une diode à électroluminescence (DEL).

Illustration reproduite avec l’aimable autorisation de Dean Madden

Mesures de sécurité

L’hexa cyanoferrate (III) de potassium est toxique. Il faut porter des lunettes de sécurité en manipulant ce produit. Si la solution vient au contact d’un œil, bien le rincer à l’eau et appeler un médecin. S’il est avalé, faire boire beaucoup d’eau et appeler un médecin. S’il vient au contact de la peau, rincer rapidement avec de l’eau. Il faut respecter la réglementation en vigueur pour l’élimination de la solution usagée.

Solution tampon

Pour preparer la solution tampon de phosphate 0.1 M, dissoudre 4.08 g de Na2HPO4 et 3.29 g de NaH2PO4 dans 500 ml d’eau distillée.

Préparation et minutage

La pile à bactéries terminée.
Cliquer sur l’image pour
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Illustration reproduite avec
l’aimable autorisation de Dean
Madden

Il faut preparer les solutions de réactifs à l’avance. Noter cependant que la solution de glucose doit être préparée moins de 24 heures avant la manipulation, car cette solution n’est pas stérile et pourrait donc servir à la croissance de microorganismes contaminants.

Laisser la membrane d’échange cationique plongée dans de l’eau distillée 24 heures avant l’usage.

On peut réhydrater la levure sèche lors de l’assemblage de la pile, bien qu’il soit important d’ajouter d’abord la levure sèche à la solution tampon avant d’ajouter la solution de glucose à la bouillie de levure. Si l’on tente de réhydrater la levure directement dans la solution de glucose, des effets osmotiques retarderont le processus. (Si l’on utilise de la levure fraîche, en faire simplement une bouillie épaisse avec la solution tampon avant d’ajouter la solution de glucose.)

Il faut environ 30 minutes entre l’assemblage de la pile et la génération d’électricité.

Possibilités illimitées de recherches

On peut metre en série plusieurs piles pour générer une tension plus élevée; le courant produit conservera cependant le même ampérage. Au contraire, augmenter les dimensions de la pile (ou de la surface des électrodes) augmentera l’ampérage, mais non la tension.

On peut utiliser différents médiateurs et/ou types de levure, comme les levures de vinification ou de boulangerie. Noter que, pour des raisons de sécurité, l’utilisation de cette pile à bactéries avec d’autres microorganismes n’est pas recommandée.

Déterminer l’effet de la temperature sur l’action de la pile à bactéries (se souvenir des types de ‘contrôles’ nécessaires en faisant de telles comparaisons).

Fournisseurs

Les piles à bactéries adaptées pour des travaux pratiques en établissement d’enseignement telles que décrites ici sont disponibles au Centre National pour l’Education aux Biotechnologies (NCBE) de l’Université de Reading, Royaume Uniw1.

Pour ceux qui préfèrent fabriquer leurs propres piles à bactéries d’après les indications du présent article, la membrane d’échange cationique et les électrodes en fibre de carbone sont également disponibles au NCBE. La membrane d’échange cationique peut aussi être achetée chez VWRw2.

Les moteurs à faible consommation adaptés à une utilisation avec une pile à combustible telle que celle décrite ici sont onéreux et difficiles à trouver.

La pile à bactéries
Illustration reproduite avec
l’aimable autorisation de Dean
Madden

Elimination des déchets et recyclage des matériaux

La solution d’hexacyanoferrate (III) de potassium est toxique. La réglementation locale doit être respectée pour l’élimination de la solution usagée.

Stockage des matériaux

La solution d’hexacyanoferrate (III ) de potassium est sensible à la lumière et doit donc être stockée dans un flacon opaque ou enveloppé d’une feuiile d’aluminium. On ne doit pas la conserver plus de six mois.

On peut vouloir stocker la membrane d’échange cationique dans un récipient d’eau distillée pour qu’elle soit prête à l’usage. Il faut remplcer l’eau de temps en temps si la membrane est stockée pour une longue période.

La levure sèche a une durée de vie limitée, même en récipient scellé. Il faut donc respecter la date ‘à utilise avant’ du fournisseur.

Remerciements

La pile à bactéries a été développée par le Dr Peter Bennetto, alors au Département de Chimie du King’s College, Londres. Elle a été adaptée à une utilisation en établisement d’enseignement par John Schollar et Dean Madden.


Web References

  • w1 – Pour en savoir plus sur le Centre National d’Education aux Biotechnologies (NCBE) et pour commander ses piles à bactéries, voir: www.ncbe.reading.ac.uk
  • w2 – Pour contacter VWR, fournisseur de la membrane d’échange cationique, voir: www.vwr.com

Resources

  • Bennetto P (1987) Microbes come to power. New Scientist 114: 36–40
  • Bennetto HP (1990) Electricity generation by micro-organisms. BIO/technology Education 1: 163–168. Cet article peut être téléchargé sur le site NCBE: www.ncbe.reading.ac.uk ou ici: http://tinyurl.com/ncf6ql
  • Lovley DR (2006) Bug juice: harvesting electricity with micro-organisms. Nature Reviews Microbiology 4: 497–508. doi: 10.1038/nrmicro1442
  • Sell D (2001) Bioelectrochemical fuel cells. In: Biotechnology. Volume 10: Special Processes (Second edition). Rehm H-J and Reed G (Eds). Frankfurt am Main, Germany: Wiley-VCH. ISBN: 9783527620937

Author(s)

Le Dr Dean Madden est un biologiste travaillant pour le Centre National d’Education aux Biotechnologies (NCBE)w1 de l’Université de Reading, Royaume Uni. Le NCBE a été créé en 1984 est a depuis lors acquis une réputation internationale dans le développement de programmes éducatifs innovants. Ceux-ci ont été traduits en de nombreuses langues, dont l’allemand, le suédois, le fraçais, le néerlandaais et le danois.

Review

Le présent article décrit une pratique de laboratoire pour la démonstration de l’usage de la chaîne respiratoire. Elle est parfaitement adaptée aux leçons de biologie sur la respiration microbienne. Il semble évident de l’utiliser comme extension des exercices sur la fermentation.

Cette pratique de laboratoire peut être utilisée de façon interdisciplinaire à l’interface de la biotechnologie et de la physique, en montrant l’utilisation des microorganismes pour la production d’énergie. Elle pourrait également être reliée à la production de bioéthanol comme exemple d’une voie biotechnologique alternative de production d’énergie

Niels Bonderup Dohn, Danemark

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